Le nouveau président de l’UDECAM, Gautier Picquet, a attisé la polémique concernant le rôle de Google et de Facebook sur le marché de la publicité. Dans une récente interview, Picquet parle du rôle exercé par les agences face aux GAFA (acronyme faisant référence à Google, Apple, Facebook et Amazon).

Stéphane Levy a répondu à ces déclarations en apportant sa vision personnelle et professionnelle en tant que Président du Groupe Labelium. Ces deux points de vue, que nous reproduisons ci-après, nous permettent d’analyser les défis auxquels les agences de communication sont actuellement confrontées. 

En tant qu’agence, est-il possible de limiter l’investissement sur Facebook et Google ?

L’un des points abordés par Gautier Picquet dans son interview est la manière dont devraient réagir les agences face à certaines décisions des GAFA qui ne plaisent pas au secteur publicitaire. Le président de l’UDECAM (Union des entreprises de conseil et achat média) plaide pour que l’industrie maintienne une position forte : « En clair, qu’on arrête de râler contre Facebook et Google à coup de tribunes et qu’on leur coupe les budgets quand on estime qu’ils ont tort. Nous avons tout de même des moyens de pression financiers. En France, Google et Facebook captent respectivement près de 3,3 milliards et 1 milliard d’euros net dont la plupart transitent par nos mains. »

Face à ces affirmations, Stéphane Levy s’interroge : « Le rôle de l’agence n’est-il pas de garantir la meilleure allocation pour ses clients ? Comment réagirais-tu si ton banquier t’annonçait ne pas utiliser telle assurance ou tel investissement pour toi, sous prétexte qu’il ne les apprécie pas alors même que le coût ou le rendement serait meilleur ? Et il ajoute : « Personnellement, je trouverais cela au mieux suspect, et je lui dirais que ce n’est pas son argent, que je le paye pour assurer le meilleur résultat/profiter de son expertise, dans le cadre que je lui définis ». 

La position dominante de Google et Facebook

Gautier Picquet se penche également sur la question de l’hégémonie des GAFA sur le marché publicitaire digital et désapprouve la manière dont Google a pris la décision de changer la gestion des cookies tiers sur Chrome. « C’est la preuve que Google est une entreprise qui pense d’abord à ses intérêts et veut imposer sa vision au reste du marché », affirme-t-il.

Face à ces déclarations, Stéphane Levy interroge Picquet : « Ne penses-tu pas que cela est le ressenti des agences indépendantes face aux BIG 6 (tu annonces d’ailleurs fièrement les 99 % d’investissements que l’UDECAM représente : peut-on dire que plus de 90 % passe par les BIG 6 ? N’est-ce pas une position très forte ?). C’est pour mon agence un combat permanent depuis 15 ans que d’essayer d’émerger face à vous, à votre puissance politique, aux remises des régies complexes à appréhender (85 %, 90 %, 95 % ?), à votre force commerciale. »

Google et Facebook ont transformé le secteur dans lequel les agences opèrent : elles doivent maintenant changer leur modèle d’entreprise pour faire face aux menaces permanentes de l’internationalisation ou d’autres challengers indépendants. 

Stéphane Levy, Président du Groupe Labelium

Les étroites marges bénéficiaires du secteur publicitaire

Selon Gautier Picquet, les agences doivent savoir refuser un pitch lorsque les conditions tarifaires sont dérisoires ou lorsque l’« on sait qu’il est perdu d’avance. » Dans ce sens, il affirme qu’il faut cesser d’accepter l’inacceptable, à commencer par le fait que les niveaux de rémunération ne sont alignés ni sur les compétences des consultants ni sur leur charge de travail.  

Quant au défi posé par les marges bénéficiaires du secteur de la publicité, Stéphane Levy admet que la pression est colossale, mais il s’avère qu’il y a de nouveaux acteurs qui parviennent à se démarquer et qui semblent pouvoir gagner leur vie. « Prends The Trade Desk, société créée il y a à peine 10 ans, valorisée à près de 12 Milliards soient des niveaux quasi équivalents à ceux de Publicis ou WPP, avec seulement 1500 collaborateurs », explique S. Levy. 

Le véritable rôle des agences de communication

Stéphane Levy compare la position de Picquet avec le combat que Kodak a mené face à la commercialisation des premiers appareils photo numériques, avec le paradoxe que les agences de l’UDECAM pourraient facilement devenir « l’iPhone du secteur ». « Tu as en effet de l’or entre les mains : des équipes talentueuses, un spectre d’expertises colossal et des clients merveilleux », mentionne S. Levy.

Pour conclure, le président du Groupe Labelium redéfinit les termes : « Notre rôle à tous, agences BIG 6 et indépendantes, est selon moi de considérer tous les leviers, d’apprécier leurs forces et faiblesses, de diversifier les investissements tout en intégrant les philosophies spécifiques de chaque annonceur et en développant un Framework de mesure neutre […]. »

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